Détruire des milieux naturels… sous couvert de développement des énergies renouvelables…

Le barrage de Conflan permettrait, selon la CNR et les SIG, de produire en moyenne 141 GWh/an. Si ce projet a pu voir le jour, c’est parce que l’ambitieuse Programmation Pluriannuelle des Investissements (PPI) de 2010 a fixé comme objectif français, à l’horizon 2020, une augmentation de 3 TWh/an de l’énergie produite issue de l’hydroélectricité. La PPI est décidée par le Ministère de l’Industrie et de l’Energie, pour prévoir et promouvoir les investissements permettant d’assurer l’approvisionnement de la France en électricité.

Le projet s’inscrit également dans l’objectif européen des « 3×20 » (atteindre en 2020 les 20% d’énergies renouvelables et les 20% d’économies d’énergie).

Ne pas faire fi de l’impact environnemental

Le développement des énergies renouvelables est certes indispensable, mais il doit également être mis en œuvre de manière cohérente avec les autres politiques publiques et sans aller à l’encontre d’autres enjeux tels que la préservation de la biodiversité et de la ressource en eau, tout aussi fondamentaux…

Energie renouvelable ne veut pas dire énergie sans impact environnemental !

Or, il semble bien que la PPI ait été élaborée sans tenir compte de ces impacts… En effet, les impacts sur les écosystèmes d’un nouveau développement de l’hydroélectricité (dont les capacités sont somme toute très modestes) sont disproportionnés par rapport aux gains de production espérés. Ce constat doit nous encourager à abandonner les projets de nouveaux barrages et à rechercher d’autres solutions.

La schizophrénie de nos politiques publiques…

Avec la PPI, les entreprises productrices d’électricité sont encouragées, côté français, à proposer de nouveaux projets de barrages pour atteindre les objectifs de production annoncés. Or, ces projets vont à l’encontre d’autres politiques publiques, qui visent, elles, la préservation des écosystèmes. La Directive Cadre sur l’Eau, entre autre, est sous tendue par le principe général de non dégradation des milieux. La traduction de cette Directive en France a conduit à la mise en place d’actions de renaturation ou de préservation qui doivent permettre d’atteindre le bon état écologique et chimique des cours d’eau (actions visant l’amélioration de la circulation piscicole, du transit sédimentaire, de la qualité des eaux, etc.).

Le constat des erreurs du passé a par ailleurs conduit à entreprendre d’importants projets de reconquête des milieux naturels remarquables du Rhône, dans le cadre du plan Rhône. Peut on décemment continuer à détruire d’une main ce qu’on restaure de l’autre?

Enfin, ce nouveau projet de barrage prévoit le détournement du cours d’eau de l’Annaz, affluent rive droite du Rhône. Le contrat de rivière transfrontalier Pays de Gex – Léman identifie ce cours d’eau comme ayant un fort potentiel piscicole : à proximité de l’embouchure dans le Rhône, l’Annaz abrite une faune piscicole diversifiée, incluant notamment loche franche, gardon, vairon, blageon, truite… Le secteur entre la voie ferrée et l’embouchure abrite des zones de frayères indispensables pour la reproduction de la truite. Le contrat de rivière du Pays de Gex a déjà investi dans la mise en place de passes à poissons pour rétablir la continuité piscicole et ainsi permettre la remontée des truites du Rhône…

Le détournement prévu de l’Annaz risque de réduire à néant les efforts consentis sur ce cours d’eau…

D’autres solutions existent

Ces incohérences sont d’autant plus regrettables que des solutions existent.

Dans un tel contexte, un changement radical de la politique énergétique, orienté vers les économies d’énergie, s’impose. La seule énergie qui n’a pas d’impact sur notre environnement est celle que l’on ne consomme pas !

Sobriété des comportements et développement volontariste de l’efficacité énergétique doivent être les fers de lance des politiques énergétiques tant françaises que suisses.

Le développement des énergies renouvelables doit quand à lui se faire de manière accélérée, tout en respectant les milieux naturels : solaire thermique (eau chaude), photovoltaïque (en priorité installation sur les bâtiments existants, parking…), grand et petit éolien (sous certaines conditions), énergie bois (dans le respect de la biodiversité des forêts), géothermie profonde, biomasse/biogaz avec une production décentralisée en lien avec /en réponse à des besoins locaux.

Quant à l’énergie hydroélectrique, elle doit faire l’objet d’une modernisation des installations existantes, sans nouvelles installations sur les rares sites vierges résiduels.

 

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